Blog – Germinal Rebull https://germinal.rebull.fr Le site de Germinal Rebull Sat, 16 Oct 2021 07:10:16 +0000 fr-FR hourly 1 Le retour des fouaciers de Lerné à Banyuls-sur-Mer. https://germinal.rebull.fr/le-retour-des-fouaciers-de-lerne-a-banyuls-sur-mer/ https://germinal.rebull.fr/le-retour-des-fouaciers-de-lerne-a-banyuls-sur-mer/#respond Fri, 08 Oct 2021 13:10:44 +0000 https://germinal.rebull.fr/?p=1446 Où est donc le col de Banyuls sur Mer ?

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Banyuls su Mer est né au fil des siècles par la lente pénétration des moines de San Quirce de Colera, ce monastère à un jet du col de Banyuls du coté Catalogne Sud. Cette conquête du versant nord s’est faite le long de la rivière « la Baillaury ». Ce qui confère à ce bout de crête qui sépare la France de l’Espagne le statut multiséculaire d’être un point essentiel d’une artère qui en longeant la rivière permet des échanges économiques locaux, la continuité d’un tissu social, familial et culturel aussi vivace d’un coté que de l’autre.

Or il se trouve que dans la situation actuelle, dans un climat propice aux décisions administratives expéditives pour cause de pandémie, ce col est fermé et orné de blocs de béton interdisant tout passage de véhicules. Ce col doit être un point stratégique de premier ordre, car c’est le seul du département, voire le seul de la chaîne des Pyrénées, dûment et réglementairement interdit. Quand on constate que la jauge de cette petite route de montagne permet le croisement de deux automobiles, conduites avec délicatesse à certains endroits, il échappe au commun de se représenter le danger imminent et formidable qui nous menace.

La question est donc de savoir quel est-il, quelle est la raison d’État qui confère aux blocs de béton la valeur équivalente d’une grande armée. A comparer la taille du col et l’importance qui lui est donnée, cela ressemble à un scénario proche de la bagarre des Fouaciers, un chapitre capital du Gargantua de Rabelais dont l’exposé est :  « Comment feut né entre les fouaciers de Lerné, et ceulx du pays de Gargantua le grand débat, dont furent faictes grosses guerres ». 

Soit une altercation sur des gâteaux qui engendre un conflit planétaire. 

L’autorité préfectorale, dûment accréditée pour assurer notre sécurité impose la fermeture de ce passage, et laisse filtrer de temps en temps quelques bribes de motifs que ses espions auraient glanées ici ou là. Ils sont de la plus haute importance cela va de soit, et ils justifient que les blocs de béton sur ce col veillent sur une ligne à tenir qui en plus est inspectée rigoureusement aux heures de ronde par des patrouilles de la maréchaussée et même des militaires aux aguets. 

Parfois il se dit que c’est pour lutter contre l’immigration clandestine. Voyons, voyons ! l’autorité n’est pas aussi naïve, elle sait que ces gens ne peuvent pas, obligés qu’ils sont, posséder des voitures. Il est vrai que la possibilité de prendre un taxi reste une option. Et comme cette même autorité a le loisir de vérifier, tous les matins, que ces pédestres sujets ennemis en déroute se promènent dans les vignes et les petits sentiers qui contournent les blocs, il est or de question que l’immigration soit le motif raisonnable.

 S’agirait-il d’arrêter les go-fast chargés de stupéfiants ? Ceux-là ne sont pas plus dupes que les autres, ils sont équipés pour passer par les voies maritimes bien plus rentables et si l’on sait qu’ils empruntent parfois ce col, c’est donc que l’on en arrête quand même. Ce qui démontre que les douaniers sont efficaces. Là encore nous nous trompons, ce ne peut être le motif. 

Serait-ce que le chef sous la pression de commerçants veuille limiter les pertes ou les gains de ceux-là et de ceux-ci au vu des différences de tarif pour des produits usuels ? Non, car dans ce cas tous les autres passages devraient être fermés pour tarir efficacement la fuite des devises. Ce n’est pas la bonne piste. 

Plus consulaire, il s’agirait de se prémunir d’un danger politique que constituerait un déplacement de Monsieur Puigdemont dans un restaurant de Figueras. Peu crédible, le chef de l’autorité est bien plus pointu, l’interdiction de passage serait disproportionnée, d’autant que comme expert en matière de sécurité, la biographie du chef l’attestant, les moyens pour que ce monsieur aille manger ailleurs qu’à Figueras existent au niveau européen. Erreur de nouveau.

Vu dans son ensemble et sans raison raisonnable, tout cela ressemble à l’image d’un capitaine qui dans sa cale bouche « le trou » avec son index pendant que toutes les planches de sa nef se disloquent au point que crabes et poisson s’installent dans l’espace du navire.

 Il y a donc un très mystérieux motif expliquant le sacrifice de ce marin. 

J’ose à peine mentionner l’hypothèse qui suit. On la raconte dans les cafés, j’en ai été témoin, et pas qu’une fois. Afin de ne pas laisser une once d’amateurisme dans ce bilan, j’anticipe la conclusion, cette hypothèse ne peut-être le motif. Ce serait trop drôle. 

Et pourtant, en juin de cette année il y eut un incident au col de Banyuls sur Mer. Élus et citoyens croyant le danger écarté et fort d’un avis qui permettait de libérer les blocs de béton de leur prison, tous se rendirent au col pour ouvrir la veine obstruée pour raison d’État. Grave erreur, le préposé-chef-chef fit savoir que son autorité était bafouée et que cette désobéissance manifeste des citoyens justifiât d’un contre-ordre. Celui-ci fut édicté, définitif, affirmatif, et mis en œuvre dans l’instant. L’incarcération du béton sur ce col allait se prolonger, leur sursis tombait. Le motif serait donc une vilaine colère de notre décideur comme celle qu’eut en son temps Grandgousier, ce protecteur des fouaciers de Lerné.

Le responsable de notre sécurité aurait-il été emporté par son fort caractère ? Quand on sait qu’une colère qui dure plus de quelques minutes est plutôt une maladie !

Lecteurs nous vous avons averti, ce ne peut être la bonne raison, elle serait inimaginable, le grade est trop important, il n’est accessible qu’à la froideur analytique. Là haut on a lu Sun Tzu, ce guerrier admirable par la distance qu’il conseillait à tout velléitaire en rajoutant à l’adresse de ses disciples : « Dites aux gens ordinaires ce qu’ils veulent entendre ».  Il semble donc difficile d’apporter une juste réponse, en tout cas qui soit d’Etat.

Dans le doute, terminons sur un conseil littéraire : il est temps de relire Rabelais et deux fois au moins le dernier chapitre, celui où l’on peut lire que faisant suite à son petit énervement  Grandgousier engagea une guerre totale qui ne fut pas un franc succès.

Ah! Rabelais, ce fin observateur des petites choses qui ont une valeur universelle.

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Avec ou sans https://germinal.rebull.fr/avec-ou-sans/ https://germinal.rebull.fr/avec-ou-sans/#respond Sat, 01 Aug 2020 11:45:25 +0000 http://germinal.rebull.fr/?p=1397 Un article paru juste après les élections municipales de Paris de cette année (2020) [1] proposait que finalement ce soit sans le peuple qu’elle se soit tenue , confirmant un peu plus le fait que dans quelque temps les abstentionnistes devenant la majorité du peuple, ceux qui ont la charge de les représenter ont un […]

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Un article paru juste après les élections municipales de Paris de cette année (2020) [1] proposait que finalement ce soit sans le peuple qu’elle se soit tenue , confirmant un peu plus le fait que dans quelque temps les abstentionnistes devenant la majorité du peuple, ceux qui ont la charge de les représenter ont un emploi assez proche de la vacation. En substance l’article suggère que la gouvernance peut se faire sans autre opérateur que la gouvernance elle-même.
À peu près au même moment un autre article nous apprenait que les dirigeants d’Amazon allaient créer des centres commerciaux sans caissières, un peu en retard sur eux-mêmes puisque les centres commerciaux sans existence réelle sont déjà la norme. Démontrant par là que la consommation peut se faire sans autre opérateur que le consommateur lui-même, tous les autres intervenants restant invisibles. La question de la similitude se posait: Etat et Amazon même combat ?

Sans trop m’avancer, il me semble que la notion de démocratie fut le fait de quelques citoyens athéniens. Si aux 30000 habitants de la Cité on ôte les 15000 métèques vivant hors les murs, les 7500 femmes, vivant elles dans les murs, les enfants en bas âge et que dans le solde restant, ceux ayant des moyens de s’exprimer avec un peu de talent constituaient un petite milice alors oui, quelques centaines seraient le bon compte.
À partir du malaise qui venait de la répartition de la propriété agricole, la puissance de la parole de ce petit groupe aura suffi à poser le jalon de la démocratie occidentale. Malgré le faible nombre d’intervenants, une idée novatrice pour tous était née. La loi faisant que la force d’un seul soit remplacée par celle du nombre.
Il va sans dire que de nos jours, les simples gens, les femmes et les divers exclus sont enfin comptabilisés au titre d’électeurs. Ce au bout de luttes historiquement étalées dans le temps et malgré le transfert de la parole vers un jeu de mots mouliné par les médias, chacun restant juge du niveau de « contenu » que ces derniers véhiculent. La démocratie fluctuera en cherchant son équilibre entre une loi raisonnée et l’opinion du nombre. L’opinion pouvant être reprise en main par un seul, l’histoire des médias rentrant en ligne de compte.

L’équation conceptuelle de la démocratie prit forme sous Périclès . L’axiome central étant que c’est avec le peuple que la mécanique fonctionnait [2]. Le calcul étant qu’au plus grand nombre se manifestant il se superposait, une vérité proportionnelle, comme si « plus on est, plus on a raison ». Ils se trompaient souvent et il faut noter que la vérité appartient historiquement à des minorités qui jouent leur rôle de précurseurs, statut qui peu couter cher . Quelques-uns de ces héros visionnaires (les rescapés) se retrouvent à l’occasion d’une opportunité politique, dans des mausolées de l’État, et tout comme de grands peintres, n’obtiennent de la reconnaissance qu’après la fin d’une vie de quasi-métèque.
L’axiome consiste en une vérité induite par la quantité. Le théorème le vérifie par l’action du vote. La preuve par neuf est la légitimité proclamée que confère un bon résultat. Cela résiste au temps. Le vote et la légitimité qui le sous-tend sont invoqués à la moindre secousse de la collectivité, il fait droit sans que parfois l’on ne sache plus de quoi il retourne.
Du moment que c’est voté même par la minorité des citoyens qui n’a pas séché les urnes, le terme démocratie est légitimé. C’est comme un donjon imprenable et c’est cet aspect-là qui a le mieux traversé le temps. Ici il est bon de renvoyer à la lecture des ouvrages d’Alain Supiot [3] sur le périple de la démocratie dans les siècles vu à travers différents prismes. Incontournable. Introduire dans le théorème une nouvelle variable premettrait de mieux se connaître, ce serait la comptabilité du vote « blanc ».

Il y a probablement bien des manières d’examiner pourquoi avant c’était avec les gens et les boutiques et que dans notre présent ou futur proche ce sera sans.
Une façon, celle de votre serviteur, est de pratiquer la géologie amateur, de faire une sorte de coupe sur ce qui est avec ou sans.
Au début, en haut, il y avait des gens qui décidaient avec et pour d’autres gens. Un peu en dessous d’autres et à l’étage inférieur d’autres encore jusqu’en bas. Mais il restait toujours la couche tout en bas, le socle de cette pyramide qui sont les choses. La justice, l’économie, la marine, la religion, la culture, toutes les résultantes de ce qui était entendu et se décidait au-dessus.

Dans un raccourci éclair nous ramenant à l’article du Monde on pourrait dire que l’absence quasiment normalisée du peuple (les gens) n’empêche pas la mécanique de fonctionner. Qui décide alors ? Des élus de circonstance ? Ou bien seraient-ce les choses ? Pas mal d’entre elles en tous cas sont déterminantes dans le choix du bulletin. Aux USA on gagne ou on perd sur le thème central de l’économie des choses.
Donc, tout en haut, les choses décident du vote.
Il y a ensuite des gens, un petit nombre qui veillent à la bonne marche de cette économie. En descendant finalement on trouvera les gens, le peuple lui-même fragmenté en consommateurs plus ou moins capables selon les moyens dont ils disposent.
Il y a eu un lent glissement des plaques. Celles dont la composition étaient avec les gens sont passées de dessus à en dessous. Et inversement celles dont la composition est « sans », se retrouvent tout en haut.

Amazon est un repère clair dans la coupe, un modèle exemplaire, un projet novateur qui prend en charge tout, y compris la culture, si ce n’est pas déjà le cas, et bientôt les religions avec sponsors en option.
L’actuelle crise due à un virus, on le voit sert à promouvoir la stricte légitimité issue des choses : l’économie et elle seule, sur le modèle Amazon. Comme on se doute que ce virus est juste un apéro et que la catégorie auquel il appartient nous cuisine un copieux menu pour les années à venir, l’indigestion est garantie pour ce qui reste des fondamentaux de la démocratie.

Dessin de Robida

Ce qui est bien en géologie c’est la rencontre avec des témoins du passé, des émergences ou des fossiles qui racontent le mouvement. Ainsi il y a des îles, des cheminées, des falaises, des bunkers qui ont résisté aux déplacements et où il est loisible de repérer les traces anciennes, des passages et la position des strates en altitude.
Disons que tout n’est pas perdu, on a encore le droit de se promener dans un paysage qui passe de « à l’endroit à l’envers ».
Que des découvertes en perspectives !

  1. Le Monde du 18/07 « Les municipales en 2020 ont été une élection sans le peuple » de Jean-Yves Dormagen
  2. L’idée de démocratie n’est pas réductible aux périodes historiques grecques. Des précédents, des formes plus élaborées ou différentes existent. Voir entre autres « La société contre l’État » ed Minuit 74, de Pierre Clastres.
  3. Alain Suppiot, Juriste et professeur au Collège de France. Nombreux titres sur le sujet.

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Histoire de Noël https://germinal.rebull.fr/histoire-de-noel/ https://germinal.rebull.fr/histoire-de-noel/#comments Sun, 28 Dec 2014 17:26:18 +0000 http://germinal.rebull.fr/?p=1297   Le 28 décembre, rue du Faubourg saint Antoine, il fait froid, je marche, et sur la distance d’une station de métro je vois que la plupart des recoins offerts par des portes-cochères et des chantiers, sont habités par des familles entières avec des enfants très jeunes, et là aussi des petits emmitouflés qui tètent. […]

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Le 28 décembre, rue du Faubourg saint Antoine, il fait froid, je marche, et sur la distance d’une station de métro je vois que la plupart des recoins offerts par des portes-cochères et des chantiers, sont habités par des familles entières avec des enfants très jeunes, et là aussi des petits emmitouflés qui tètent. C’était Noël il y quelques heures.

Juste après, et comme une exceptionnelle variante du décor de la rue, c’est le long de la façade d’un magasin de surgelés que dorment deux hommes. le froid est là…

 

Facile la classique digression, l’association d’une image à des mots qui font sourire, les journaux en donnent par colonnes entières aux pages dédiées à l’humour. Là, on pourrait dire que seules manquent les étiquettes, ces dernières bien plantées sur le dos de ces deux articles en promotion. Facile, et avec les secondes qui passent elle deviendrait honteuse.

La bouche d’extraction d’un magasin de froid produit du chaud et cela, vingt-quatre heures sur vingt-quatre, ce qui garantit qu’à l’intérieur du magasin, tout est en ordre, surgelé à souhait. Alors le sourire disparaît et il devient possible de voir cette niche apparemment glacée, comme l’expression de la rationalisation du pouvoir probable que ces deux hommes exercent sur le reste des familles alentour. Priorité aux plus forts. L’endroit est luxueux et confortable. L’un des deux hommes se lève et va chercher une cigarette dans le campement voisin, il revient et s’installe de nouveau dans la tiédeur de la ventilation. On en viendrait à le détester cet homme-là, le magasin aussi, la rue toute entière aujourd’hui, la rue  parée de centaines de lumières qui clignotent.

Ma marche reprend. Je n’achèterai pas le journal.

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Guy Claude François. Ce soir, répétition générale, un siège reste vide. https://germinal.rebull.fr/guy-claude-francois-ce-soir-repetition-generale-siege-reste-vide/ https://germinal.rebull.fr/guy-claude-francois-ce-soir-repetition-generale-siege-reste-vide/#comments Tue, 04 Feb 2014 08:00:41 +0000 http://germinal.rebull.fr/?p=1110 C’est surtout quand les choses tardent à se mettre en place que Guy Claude jardine ses colères froides. Jamais de mots forts cependant, pas d’ordres impératifs non plus. – Bon et bien puisque vous savez le faire je peux m’en aller, vous n’avez pas besoin de moi. Il ne va pas loin bien sûr, dans […]

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C’est surtout quand les choses tardent à se mettre en place que Guy Claude jardine ses colères froides. Jamais de mots forts cependant, pas d’ordres impératifs non plus.

– Bon et bien puisque vous savez le faire je peux m’en aller, vous n’avez pas besoin de moi.

Il ne va pas loin bien sûr, dans les coulisses, au foyer parfois, il y aura bien quelqu’un avec qui bavarder et prendre un café. Et de là il peut entendre les voix qui le réclament depuis le plateau.

GCF150

-Où est Guy Claude ? Vous l’avez vu ?

Ce sont les mots qu’il attend tranquillement pour revenir, mais sans se presser. Il lui faut un ou deux rappels et il a le temps de finir son café. C’est sa dramaturgie pour chaque chose de sa vie. Il fait pareil même quand il s’agit de corriger l’orthographe des mots qu’on lui envoie. :

– Eh bien écris comme tu veux…

Sous entendu si tu veux faire ta petite académie dans ton coin te gêne pas. Surtout qu’il a fait du latin et qu’il nous en sert de temps en temps, comme pour donner du poids à ses arguments. L’antique c’est imbattable.

Mais c’est surtout l’histoire du siège. Alors là il est fort.

– Le siège là, il est inutile, personne ne s’assoira là, il faut le supprimer, le mettre ailleurs, tu ne comprends rien,  no comprendo ? Qu’il siffle.

Je me demande d’ailleurs si « no comprendo » qu’il utilise souvent est extrait d’un album de Tintin ou s’il considère que cette expression espagnole, suffisamment proche phonétiquement du latin lui permet une pointe de véhémence indispensable pour conclure. Mais comme il nous dit sans arrêt que le théâtre c’est l’art de faire du vrai rien qu’avec du faux, ce genre de glissade ironique est une preuve de plus. Faux mais conforme. De l’art quoi ! Il ne dit pas pourquoi le siège est mal placé, mais il le sait, et si les arguments qu’on éructe créent un désaccord, il ne s’oppose surtout pas, il invite à revenir au bon moment dans la salle, le jour où justement tout est plein sauf le siège. Et il sourit.

Quarante ans de théâtre et c’est toi qui vas m’expliquer…

C’est comme pour la faute d’orthographe, il connaît sa conjugaison. Bien sûr il se trompe parfois et dans ce cas il glisse gentiment une formule d’enfant qui se fait attraper….

– Ah bon ! Je n’avais pas compris, c’est que tu as une drôle de prononciation, tu expliques mal…

Il a les formules magiques.

Guy Claude se ballade dans les actes de sa pièce avec l’aisance d’Arlequin. Pas le rustre, non, celui des origines, le fils des soufis des temps anciens, ceux qui ont pour mission ici bas de nous indiquer le chemin de la sagesse avec une bonne dose de dérision. Et il aime cela la dérision Guy Claude, il est très bien dans ce rôle. Des leçons il en a donné, de vrais succès.

 Guy Claude ne revient pas. S’attarde-t-il au foyer ? Quelques jours déjà qu’il ne se montre pas. Le théâtre devient immense, les murs de la scène s’écartent, on les voit à peine maintenant, cela va être très difficile à éclairer tout cet espace vide qui s’assombrit, on devra repenser le décor et se remettre au boulot sans lui, il va falloir s’y reprendre à plusieurs fois. Pendant quelque temps on va hésiter, on appellera le foyer, on ira inspecter les coulisses pour voir si des fois…

C’est la Générale, il y a tous ses amis dans la salle, et nombreux, mais son siège reste vide, non pas celui qui est mal placé, le sien.

 Il est juste en retard c’est sûr, il va passer nous donner son avis à la fin du spectacle. On va l’attendre, il sait où on est non ?  

 

le dessin de décor est de Guy Claude François

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Edward Snowden bientôt au MOMA ? https://germinal.rebull.fr/edward-snowden-bientot-au-moma/ https://germinal.rebull.fr/edward-snowden-bientot-au-moma/#comments Wed, 03 Jul 2013 08:23:08 +0000 http://germinal.rebull.fr/?p=701 Et oui, Snowden confronté à un état inquisitoire et planétaire (Google +Yahoo+Facebook+etc = +- l’infini), il décide de transgresser. Mais c’est l’essence d’un acte artistique cela ! Goya qui en a assez de voir les femmes vêtues commet la « Maja Desnuda » transgressant la norme imposée par l’inquisition, celle de son temps, et voilà une grande  oeuvre […]

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Et oui, Snowden confronté à un état inquisitoire et planétaire (Google +Yahoo+Facebook+etc = +- l’infini), il décide de transgresser. Mais c’est l’essence d’un acte artistique cela !

Goya qui en a assez de voir les femmes vêtues commet la « Maja Desnuda » transgressant la norme imposée par l’inquisition, celle de son temps, et voilà une grande  oeuvre libératoire, un pas posé au-delà, soit une oeuvre artistique telle que Deleuze,  Bataille et tant d’autres l’envisageaient. Il s’agit bien de  dépasser un état, projeter une vision le dépassant et en donner un sens neuf.

D’accord, Snowden s’il a du talent, il l’ignore probablement et surtout il diffère de celui de Goya.

D’accord Snowden est réac, il soutient des candidatures de républicains américains parmi les plus durs mais le voilà lui même soutenu par la gauche américaine, comme si son acte était suffisamment  transversal pour donner à son « oeuvre »  un label universel.

D’accord il est immature et en bon geek, employé, il se paye une petite révolte, dont par ailleurs il n’est pas en mesure d’évaluer la portée, un peu comme une « oeuvre naïve »,  mais cela ne change pas la structure de son acte.

Il nous sort de la torpeur que nous acceptions alors qu’on l’imagine  des signes par ci, par là pouvaient interroger les consciences. Il déchire le rideau et aujourd’hui ne peut plus ressembler à hier.

Il pourrait donc prétendre figurer comme créateur au même titre que beaucoup d’artistes qui « dénoncent », souvent dans la redondance propre à la production publicitaire, et qui ont les honneurs de nos temples culturels.

Imaginons l’installation qui figurera le geste de Snowden. Oui au Moma, ou bien dans une biennale.

D’ailleurs c’est déjà envisagé, une aubaine, une mêlée réjouissante.

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La vaisselle, …..ou du progrès.. https://germinal.rebull.fr/la-vaisselle-ou-le-progres/ https://germinal.rebull.fr/la-vaisselle-ou-le-progres/#comments Sun, 19 May 2013 09:53:51 +0000 http://germinal.rebull.fr/?p=347 – Pourquoi n’avons nous pas de machine à laver la vaisselle ? Lluis ne répondit pas. Il continuait de rincer des assiettes une par une, soigneusement, quasiment sans bruit. Un style à lui, résultat de ce rendez vous jamais manqué avec la vaisselle du soir. Il avait mis le tablier bleu en toile de plongeur […]

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Pourquoi n’avons nous pas de machine à laver la vaisselle ?

Lluis ne répondit pas. Il continuait de rincer des assiettes une par une, soigneusement, quasiment sans bruit. Un style à lui, résultat de ce rendez vous jamais manqué avec la vaisselle du soir. Il avait mis le tablier bleu en toile de plongeur par dessus sa chemise et son pantalon. Pour protéger son uniforme de bureau, comme il disait. Depuis longtemps la visière de sa casquette avait pris une inclinaison juste, cap précis en azimut et en site pour que ses yeux soient à l’abri de l’imparable géométrie des rayons lumineux du tube fluo juste au dessus de l’évier. Seul le bas des montures métalliques des lunettes brillait. Dans l’ombre bienfaitrice de la casquette on devinait des yeux mis clos, aussi doux que les gestes indispensables à faire taire tous ces instruments culinaires dont on attendait qu’ils fassent beaucoup de bruit. Rien de superflu ne venait déranger ce rituel dans cette lumière simple. Une prière devant l’autel d’une église vide ne pourrait pas prétendre à plus de solennité.

Hein ? Ce serait mieux pour toi, tu pourrais lire pendant ce temps…

Il continua de même, mais la visière avait bougé, je compris que j’allais avoir droit à l’exposé qui venaient juste de s’échafauder entre quelques bulles de savon et une éponge.

– Ce que tu dis n’est pas faux, je pourrais lire, la machine se taperait le boulot ! Mais dans le fond on ne peut pas dire que s’occuper d’ustensiles aussi intimes que le sont nos assiettes, soit sans intérêt ?….

Ah ! bien entendu le rapport au  « moi » ! J’oubliais.

Il y allait fort le plongeur. L’artillerie lourde d’emblée…et au moment ou j’allais tenter une salve il me coupa.

– Je sais, la machine à laver le linge tombe en panne je suis le premier à en racheter une pour nous éviter un retour en arrière, celui où les femmes du village réunies, qu’il gèle ou pas…taper le linge,  les mains et le dos. Quelle douleur ! Même si ces causettes de femmes autour du lavoir, c’était du social, et perdu pour de bon.

Donc c’était sérieux, il avait pensé à plusieurs tiroirs de sortie. Lluis envisageait toujours les implications du moindre de ses propos dans plusieurs directions. Le mythe du progrès de nos jours est coté en bourse. La machine peut-être fabriquée par des ouvriers d’une usine pénitentiaire chinoise. J’étais sûr que c’était la première option qui avait traversé ses pensées. Tant d’années de lutte, c’était obligé.

Tu sais je crois qu’à chaque fois que l’homme invente une machine qui lui fait gagner quelque chose, il faut qu’il cède en contrepartie autre chose, une part plus ou moins négociable de lui-même. L’idéal ne s’atteint jamais, c’est comme les gens qui croient que la vérité se trouve en haut d’une grosse montagne. La vérité ? Tu grimpes une colline, et là haut, quoi ? Juste un bout de réponse et surtout un nouvel horizon et d’autres vérités derrière ces collines qu’on vient de découvrir, vas y mézigue ! Recommence à grimper !…

Il venait d’ôter le bouchon du bac. Rinçage des assiettes.

Lluis n’utilisait même pas l’autre bac, mais une bassine en plastique rouge en place.

– Plus économique non ? Me font rire avec la consommation d’eau…

Alors je ne savais plus très bien, où est-ce que le progrès nous libérait ? Un type comme ça, je tombais mal….

– Il y a plusieurs choses qui ne m’ennuient pas du tout, faire la vaisselle en particulier et je sais que je ne suis pas le seul.

J’entends bien.

Lluis quelques instant avant que je ne le dérange devait se promener dans les oliveraies de son village natal. La rêverie faite de cette multitude d’enchaînements de la mémoire. A cet instant, deux assiettes à laver valaient des kilomètres de la vallée de l’Ebre, à son enfance dans les fontaines de montagnes, j’en étais sûr, avec la « somera», l’âne, cet ami des enfants du patelin…
Evoquer le souvenir de Lluis faisant la vaisselle me renvoyait donc bien plus tard à une posture vis-à-vis de « l’idée de progrès ». J’étais devenu méfiant, moins enthousiaste. Adhérer à l’idée que notre époque suivait une courbe ascendante, un chemin dont le talus était chaque fois plus haut du fait de la valeur ajoutée par toute sorte d’inventions, cela je n’en étais plus du tout sûr. Ce modèle appris en maternelle avait du plomb dans l’aile, en tous cas c’est ce que je pensais.

Finalement j’étais dans un monde où le progrès me semblait se concrétiser en quelques marques célèbres, du solide plus que de l’esprit. Ce n’est pas tout à fait vrai, mais pas complètement faux tout de même.

Pas d’excuse, les grecs nous avaient mis en garde. Le progrès, un Eden inventé par nécessité. Un mythe entretenu par l’éternel labeur qui nous fait croire que l’on s’en rapproche. Mais pour chaque pas, j’allais dire pour chaque machine à laver, chaque avancée vers cet espace idéal, on s’en éloigne. C’est la dynamique du mythe, il faut bien l’entretenir, le faire survivre. Le mythe du progrès, une image euphorique pour compenser un réel hallucinant.

Pourtant c’est en contribuant à l’entretien de cette image d’un lointain Elysée, qu’on peut appeler ailleurs la Grande Prairie du Manitou, que se façonne le progrès. Après tout on vit plus longtemps et mieux. Pas partout, loin s’en faut.

Mais la démocratie, la liberté enfin aboutie est peut-être là dans le mécanisme lui-même, dans un processus auquel on ne se lasse pas de participer.

– Tu sais, j’aime faire la vaisselle, c’est un luxe d’intellectuel. Pour qu’on me vende du paradis ce n’est pas facile, il faudrait une machine vraiment extraordinaire.

Sacré Lluis, on est reparti, on grimpe

Varape Michel  Vilage

Michel Vilage
aquatinte

 1999 Germinal Rebull

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Une virée en bagnole https://germinal.rebull.fr/une-viree-en-bagnole/ https://germinal.rebull.fr/une-viree-en-bagnole/#comments Sun, 19 May 2013 09:46:04 +0000 http://germinal.rebull.fr/?p=344 La voix – « prené la départ émental cenvincink é tourné a goch ô proch hein carf our ». La voiture – « vroum vroum ». La voix – « vus avé dépaçé le carf our…veyé vus arété sur le bor dela rout en tut sé cur ité « reparté verle car four déque posibl »… Je regardais l’écran sur le tableau […]

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La voix

– « prené la départ émental cenvincink é tourné a goch ô proch hein carf our ».

La voiture

– « vroum vroum ».

La voix

– « vus avé dépaçé le carf our…veyé vus arété sur le bor dela rout en tut sé cur ité

« reparté verle car four déque posibl »…

Je regardais l’écran sur le tableau de bord juste devant le pare brise, on y voyait la carte de la région, les noms de rues et toutes les routes. Même des vicinales et les noms des hôtels en prime…à la demande. Un clic sur la touche « bars et restaurants »  et nous voilà presque à table. Notre voiture s’y trouvait représentée par un cercle rouge se déplaçant par à coup dans l’écran. On était maté de près par un GPS.

Au volant, Frank !

–   Ouah !  Je rêve, t’as vu elle me dit de tourner… !

Regarde devant ! Me disais-je, c’est pas une émission télé.

J’avais vu cet accessoire de pilotage dans plusieurs taxis parisiens. Les conducteurs n’avaient plus à passer l’examen des « rues par cœur » pour travailler. Avec ce robot file droit et au plus court.

Franck tripotait les boutons de réglage de l’écran de contrôle du GPS de la bagnole.  Il regardait d’un œil la route  et de l’autre cet engin qui nous guidait sur les routes de la Bresse. On se dirigeait vers un chantier comme chaque mardi avec une voiture louée. Mais comme Franck était très malin et qu’il était devenu copain avec les gars de la location, il avait toujours droit à une luxueuse voiture avec tous les accessoires pour le prix d’un cageot à deux portes. Ce qui m’inquiétait dans l’immédiat c’était l’aller retour de ses yeux. Un coup vers la route au bout du capot, de l’autre cet écran de GPS diffusant une  lumière apaisante, dangereuse à 100 kilomètres à l’heure.

De plus j’étais sanglé à la place du « mort » , les abdominaux pliés, les pieds en appui sur le tapis en moquette, contraint de regarder devant, cette odeur d’asphalte et de faux cuir sans aucune nuance flottant dans ce mètre cube de ferraille. Tout ce qu’un corps peut et sait faire, se révélant ici inutile. Tout cet attirail sensoriel au chômage technique.  Je me suis rappelé cet ami évoquant son séjour en tôle.  Assis ou allongé, quelques pas parfois, la même lumière, la même vue sur les toits environnants offerte par ce fenestron.  Mais aussi cette télé  important des images du dehors dans les quelques mètres cube en béton.

Dans les deux cas l’espace rendu inaccessible, qu’il soit traversé ou rapporté, c’est en deux dimensions, c’est-à-dire sous la forme même de sa négation.

Et pendant ce temps là l’autre qui conduit à l’aise, content,  l’écran du GPS lui apportant la preuve qu’il est assurément en bagnole sur cette départementale qui est bien celle qui mène là où l’on doit aller.

Regarde donc  devant! Les dents serrées pour retenir des jurons.

Encore une,  une technique plus performante, une qui fait « plus ». Ce que l’on confond par lassitude avec « mieux ». Et sans résistance nous acceptons que la technique soit investie des sens. Mieux, qu’elle devienne les « sens », alors qu’en réalité ils s’effondrent comme l’écrit William Gaddis[1].

« …partout où vous regardez, l’entropie qui submerge toutes choses visibles, le divertissement et la technologie et tous les mômes de quatre ans avec leur ordinateur, chacun son propre artiste, d’où ça vient tout ça, le système binaire et l’ordinateur d’où ça vient la technologie au départ, vous comprenez ? »

Le binaire, c’est George Boole[2]. Merveilleux mathématicien, il crée une algèbre binaire n’acceptant que deux valeurs numériques : 0 et 1. Un tour de force!  Boole tentera même de  réduire l’univers au miroir de cette logique.

Aujourd’hui cette logique trône dans le fonctionnement de toutes les  machines numériques.

C’est formidable car cela marche bien. C’est dramatique si l’on oublie son fondement syntaxique. Cet oubli en fait un outil totalitaire.

La radio ce matin, je bois un café, pas vraiment attentif.

les quatre alpinistes, tous chevronnés, ont été repérés grâce à leur téléphone portable et le système GPS. L’hélitreuillage dans des conditions météorologiques difficiles a pu être mené à bien. A Val d’Isère notre correspondant…le Capitaine de gendarmerie Biosini que nous avons pu contacter… Les quatre randonneurs sains et saufs…

Super ! Une pensée pour Franck. Il doit jubiler. Le GPS au secours de l’humanité.

Le journal du soir, au bistrot en bas de chez moi, cinquième page, juste avant le foot je parcours ces lignes :

«  …le gouvernement népalais…  décide d’organiser une grande expédition de nettoyage …concerne les sommets les plus connus tels que l’Everest … 150 sherpas ….descendre 5 tonnes de déchets. …ce serait près de 100 tonnes de détritus qui …plus communément retrouvés …cordes, des toiles de tente, des bouteilles d’oxygène, des emballages alimentaires…  des boîtes de conserve …des batteries et même des téléphones portables abandonnés par les alpinistes … »

Bon ça va.

Passons à la page foot, bien que là encore… peu d’espoir.

2002 Germinal Rebull


[1] William Gaddis : Agonie d’agapè  2003 Plon Ed :

[2] George Boole : Mathématicien et logicien anglais 1815-1864 dont l’algèbre sert de fondement à l’émergence de la cybernétique et qui est à la base des programmes informatiques.

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Slogan m’a tuer https://germinal.rebull.fr/slogan-ma-tuer/ https://germinal.rebull.fr/slogan-ma-tuer/#comments Sat, 18 May 2013 11:52:17 +0000 http://germinal.rebull.fr/?p=276 L’énoncé Une classe de collège l’élève sur l’estrade. –          C’est une petite chambre avec au fond une fenêtre. Il y a des rideaux qui sont repliés sur les cotés… –          Alors on voit par la fenêtre ?  Une voix qui vient d’un rang derrière. –          Attendez, d’abord il faut que je vous dise ce qu’il y […]

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L’énoncé

Une classe de collège l’élève sur l’estrade.

–          C’est une petite chambre avec au fond une fenêtre. Il y a des rideaux qui sont repliés sur les cotés…

–          Alors on voit par la fenêtre ? 

Une voix qui vient d’un rang derrière.

–          Attendez, d’abord il faut que je vous dise ce qu’il y a dans la chambre, une table…. une nappe…enfin dessus quoi…

–          Devant ou dans un coin ?

Un autre

–           Quoi la table ou la nappe ?

–          Ben les deux, ils sont où ?

Les élèves continuent avec crayons et gommes à dessiner sur la feuille de papier ce que décrit la jeune fille sur l’estrade d’après la carte postale qu’elle tient à la main.

C’est l’exercice du cours d’art plastique…il faut transposer l’énoncé que fait cette élève d’après une image. Et pour chaque fragment de son récit, une volée de questions qui s’embrouille en rigolade, c’est amusant, il y a tant de manière de « voir » les mots. Et on peut aussi moquer la jeune fille sur l’estrade, histoire de renvoyer toutes les difficultés et donc toute responsabilité de transcription sur les faiblesses supposées de l’émetteur…

–          « Tu as dit quoi finalement pour la table …devant la fenêtre ou à gauche ?

–          Pas tout a fait devant…comment dire ? »

Entre les mots inspirés par la carte postale et les traits sur le papier pour tenter de se réapproprier l’image source, entre ces deux points opposés le chemin est bien long. L’enfant regarde une image et l’interprète, il opère déjà des choix qui lui sont personnels, il les traduit dans un langage codé et formel afin d’émettre des mots. Derrière chacun de ceux-ci il y a l’ombre de son caractère qui modèle la phrase. Le son qui traverse la classe et qui disparaît immédiatement est alors repris, interprété par d’autres, qui décodent le message à leur manière ce qui finalement permet d’animer la main sur le papier.

Cet enchaînement peut se développer pour devenir rapidement complexe. Et pour chaque nouveau maillon que l’on découvre, les sciences les plus diverses peuvent intervenir et s’essayeront à lui régler son sort, à le décomposer en d’autres mécanismes plus intimes encore. Autant de ramifications pour tout ce qui pourrait organiser ce qui va de la perception vers sa figuration en passant par le cerveau, sans oublier les chemins de traverse qui vont de A à B ou de B vers A

–          Ouais mais dehors, par la fenêtre il fait beau ?

–          Il y a du soleil qui rentre par la fenêtre…

–          C’est jaune ?

–          Non c’est bleu…enfin genre bleu…

–          C’est comme chez tes vieux…

–          -Ouarf ! ! ! ! général.

Détails, couleurs et lumières. Les enfants ne se satisfont pas d’un catalogue d’objets. Ils sont demandeurs d’informations qui les qualifient et les enrichissent. Ils doivent recréer un espace. On en revient pour organiser le monde à ses fondamentaux picturaux.[i].

Le milieu de l’affaire

Le sujet a donné lieu à de grandes pensées et de magnifiques textes et il ne s’agit pas ici de reprendre tel point de vue sur ce qui procède de l’acte de créer. C’est ce qui se trouve au «milieu » qui en l’espèce intéresse et dans le cadre de cette petite expérience. Ce moment où les conditions pour avancer se cristallisent dans la pensée.

L’image créée à partir d’une observation ou d’une vision intérieure est formulée ne serait-ce que par une suite logique. Cette suite devenant l’arpège du processus auquel on s’accroche. Toute tension vers un objectif induit un empilage de données qu’il faut organiser puis réorganiser sur chaque obstacle rencontré.

Rien que de penser ces quelques mots «je vais faire… » …déclenche un paroxysme de raisonnements. Qu’ils soient élaborés ou frustres ne change rien. La peinture est une prise de position. La toile « Les Ménines » de Velázquez vient de loin. Du fin fond de la volonté du peintre en un long cheminement qui abouti à un manifeste de sa société et une compilation extensive des savoirs de l’époque. Un jeu malicieux de l’artiste pour dire tout ce que fut sa propre vie. Cet exemple est hors norme mais cela ne l’empêche pas d’être une forme de modèle et depuis fort longtemps. La peinture rupestre sur des parois de grotte est une transposition des peurs et des besoins de chasseurs[ii]. Pour créer, nous mettons en place une structure logique qui est le ferment du langage. Mathématique, pictural, musical, c’est pareil. C’est en passant par l’agencement de cette structure que l’on peut agir dans le temps, toile, installation, architecture, musique ou d’autres mots.

Ce premier échafaudage qui se construit dans l’intimité de la pensée permet d’établir un rapport entre le réel et sa figure qui est à venir. C’est à ce moment que se façonne l’illusion et c’est prendre un risque que de l’oublier.

Ces échanges continus entre le réel et cette organisation fonctionnent en boucle. Il s’agit d’un cycle qui si l’on y introduit la dimension physiologique de la perception est un « cycle de la vie qui apparaît en chaque phénomène vivant, c’est un balbutiement en quête de l’être »[iii].

Et quand la jeune fille sur l’estrade assaillie de questions s’emporte et dit :

–           Mais attendez vous verrez mieux si je peux parler… .

Sa formule traduit exactement ce qu’est ce moment du balbutiement dans notre crâne.

Obtenir une figuration du réel c’est mieux si on se le raconte bien[iv].

Les hasards, les recettes et les modes n’y sont pour rien. On peut toujours croire que Pollock s’agite dans un état second et que la brosse file sur la toile, animée par d’heureux accidents qui s’appelleraient l’improvisation, l’inspiration. Autant de termes sur lesquels il faudrait s’accorder…Rien ne permet de faire l’impasse sur ce petit laps de temps où l’expérience et le désir prennent le pas sur tout. Il n’y a rien « à l’improviste » dans un solo de John Coltrane ou de Dolphy, mais une superposition magistrale dans un même espace-temps des acquis et d’un récit.

Changement de rôle.

Dans cette expérience, changer de rôle, c’est se situer sur un autre point du chemin. Cela peut être dans la mise en ordre par écrit d’une vision.

Alors la lecture de quelques lignes extraites des « Irresponsables » de Hermann Broch[v] peut bien servir d’exemple. Elle a donné lieu à une petite comptabilité car le lecteur ayant été surpris par la facilité avec lequel ce texte lui permettait de « voir », il y a compté 28 mots sortis tout droit d’un livre de géométrie (en rouge) et 18 mots relevant de la couleur, d’un contraste de lumière ou d’un bruit (en bleu et jaune).

Hermann Broch

Des outils simples : géométrie élémentaire et couleurs qui donnent accès à l’espace du square. Et magistralement.

Le procédé est au point[vi]., la qualité du texte offre une multitude des possibilités à l’imaginaire et chacun peut voir sa place de square. Le texte allie technique et sensibilité.

Dans ses efforts, face à la classe, la jeune élève qui raconte une image, éprouve toutes les difficultés de la formulation, exercice où Hermann Broch fait preuve de métier.

Architectures

 Le lecteur du texte de Hermann Broch s’est laissé aller à penser que finalement s’agissant d’un texte décrivant un espace, il pouvait assez bien illustrer ce qu’est un projet architectural.

Formuler un espace par l’écriture c’est s’obliger à établir une certaine distance que ne permet pas forcément le coup de crayon. Il faut prendre son temps et avoir déjà défini ce qu’est l’objet à décrire. On peut imaginer qu’un projet architectural bien « écrit » serait le résultat d’une authentique démarche analytique. Intelligible plutôt que « rendu » comme on dit dans le métier.

D’autant que de nos jours les projets qui prétendent affirmer de nouvelles tendances architecturales sont soumis à l’avis des décideurs, essentiellement par le biais d’images légendées par quelque chose qui tient de la ligne publicitaire. Ce n’est pas tout à fait fortuit. Presque tous les projets même « pensés » sont néanmoins tamisés au travers du même crible de procédure d’évaluation. Or ce filtrage privilégie l’image et seulement elle. En particulier dans le domaine public: les concours.

Des petits mensonges en béton

 

La recherche d’effets spectaculaires qui valorisent l’image du projet, plutôt que le potentiel d’un authentique contenu, a pour objectif de faciliter le passage de ces étapes d’évaluation. Mais on comprend bien que ce souci, à force d’être soumis à l’analyse devient finalement le mode d’élaboration lui-même. Pourquoi aller loin dans la réflexion si cette réduction du contenu en images simplistes permet de déboucher sur la commande ? Il n’est pas surprenant que le bâtiment résultant exporte vers le réel cette dimension de marchandise avec son slogan. Les outils de la réflexion sur la création architecturale et urbaine sont profondément atteints car remplacés par une performance de marketing. Conséquence : l’espace urbain ressemble de plus en plus à l’étagère d’une vitrine. Les bâtiments y sont seulement exposés l’un à coté de l’autre. Seul le label fait la différence et de plus en plus nettement. En effet c’est bien le logo comme catalyseur de toute expression qui prime. Le territoire se retrouve découpé par ces gondoles de grandes surfaces. On y voit toutes les marques. Lille, Berlin, des show rooms de grands labels d’architectes.

Cela a été dit depuis longtemps[vii] et ce métier de création, tout comme les autres, se développe en intelligence avec la publicité au détriment d’un véritable argumentaire. Il n’est pas de secteur d’activité qui échappe à cette donne : une bonne place dans la boutique vaut mieux que de bonnes raisons qui ne s’expriment pas en termes de marché.

Et on est en droit de s’inquiéter car pour ce qui est « construit » même à titre privé, il y va quasiment toujours de notre espace collectif. Voilà bien une raison supplémentaire, et de première grandeur, pour consacrer de la matière grise en amont[viii] plutôt que de supporter en aval un « produit » dont la vertu est de vieillir rapidement afin d’être remplacé alors qu’il est en principe fait pour durer. Ce qui est évidemment contradictoire. Mode et commerce obligent.

La responsabilité de cette dérive est à partager par tous et pas seulement par les architectes[ix]. Le domaine construit est lié de tous cotés[x]. Par l’argent, le foncier, le programme et les utilisateurs.

Composer un espace c’est avoir, en principe, l’obligation de mettre en œuvre des outils d’analyse spécifiques. Mais il faut le noter, les constructions les plus emblématiques de notre époque sont introduites dans notre environnement par le biais de cette simplification de communicant[xi].

 

Bon…

Pour espérer échapper à la culture des illusions faut-il compter sur l’épuisement des procédures actuelles et sur l’usure des « produits » eux- mêmes, comme dans cette belle image du Centre Pompidou s’écroulant sous le poids des visiteurs[xii] ?

Peut être pas seulement.

L’éventail des directions de recherche est aussi vaste que l’est notre nouvelle géographie : le monde.

Voyons la musique, la danse et d’autres formes d’expression qui révèlent notre époque selon des dimensions innovantes et comme autant de possibilités inattendues. En faire l’inventaire est inutile ici. Cela pourrait être De Stijl tout aussi bien que le groupe DJ Spooky et son pianiste Matthew Shipp.

La Galerie Tiphaine à Paris a exhumé et exposé des travaux d’architecture de 1975 qui continuent aujourd’hui de nous interroger en nous proposant de hiérarchiser l’espace grâce à un inventaire précis de ses qualités interne propres.[xiii].

 

Valparaiso tracé

 

Tracé pour « Travesia de Bahia Blanca, Ecole de Valparaiso.

Un seul exemple

 

Hermann Broch est venu de loin à la rescousse de l’élève de collège à la carte postale. Alors ne nous privons pas de citer un seul exemple pour essayer de trouver une similitude en architecture. L’Ecole d’architecture de Valparaiso[xiv], qui sous l’impulsion de Alberto Cruz, dès les années 50 s’attacha à la réalisation d’incroyables prototypes et structures avec ses élèves.

Des poètes, ceux là qui étudiaient le sens des vents sur les dunes pour composer[xv]. La moindre variation du relief étant considérée comme patrimoine du site et donc « mot » incontournable du projet qu’on se devait d’enregistrer comme principe constructif.

Valparaisobleu jaune rouge

Dès le début d’un projet, les tenants de cette école donnaient la plus grande importance à un inventaire du site dans une démarche respectueuse laissant ainsi présager d’une ligne de conduite pour l’ensemble du processus. Au départ du projet ils procédaient sur site à une espèce de cérémonial, acte fondateur où collaborateurs et public étaient conviés. Cette sacralisation, sorte de prologue au projet, permettait de déclarer que ce qui se trouvait là, sur ce terrain n’était pas sans forme et sans histoire. La mise en forme n’était pas en rupture avec ce qui avait existé là. Une claire conscience de ce que le projet allait emprunter à la nature et au temps présidait. Le projet terminé devait dans ses formes et ses fonctionnalités rappeler des dimensions qui dépassent le cadre de notre action. Le capital initial n’était pas dilapidé et comme il se trouve que les réalisations de cette école ayant été presque toutes éphémères, on peut constater qu’en effet tout a été restitué.

 

 

Hospederia del Errante, Miguel Eyquem 1981 Ritoque , Quintero

L’acte collectif et public initial, « Phalène » excluait ainsi le culte du nom pour laisser place à celui du don de la vie depuis la nuit des temps. Le groupe faisait appel à toutes les disciplines, philosophes, poètes, biologistes… Mais non pas pour les utiliser comme citations ou références faisant office d’hommage ou faire valoir. Ces intervenants étaient des acteurs du projet. Grâce à quoi l’Ecole d’Architecture de Valparaiso a su entretenir une critique vivace très précise de son temps.

L’orthodoxie architecturale de ces années, représentée ailleurs par Le Corbusier ou Mies Van der Rohe, n’a pas eu de prise sur l’élan des gens de Valparaiso[xvi].

L’inspiration c’était :

« La vie journalière urbaine ».

A y regarder de plus près, ces trois mots tracent le petit parcours qui devrait présider à l’acte d’aménager l’espace :

L’homme, le temps et l’espace.

S’y consacrer, un poème.

© 2000  Germinal Rebull


[i] Il s’agit d’un compte rendu de travaux  réalisés par une classe de 4ème dans un collège de Paris.

[ii]Un récent article publié le 4 Décembre 2003 dans « Le Monde » L’art rupestre préhistorique est-il porteur d’un langage ? Pour Emmanuel de Roux  les œuvres rupestres s’apparentent à un véritable langage dont il déchiffre la grammaire et la syntaxe.

 

 

[iii] Viktor Von Weizsaecker in « le cycle de la structure » Desclée de Brouwer Ed.

 

[iv] Figuration n’est pas pris au sens utilisé comme par exemple pour peinture figurative mais génériquement comme un résultat ou une interprétation

 

[v] « Les Irresponsables » de Hermann Broch 1949 Gallimard ed 1961. Traduction Andrée Picard.

 

[vi] Ces outils rappellent par exemple l’usage qu’en firent les néo-plasticiens.

 

[vii] La plupart de nos penseurs ont déjà, et avec plusieurs éclairages différents, identifié cette caractéristique de notre temps. Mais citons l’un des plus pertinent : Harold Rosenberg in «  The De-definition of art » 1972. Evoquant l’œuvre de Arp «Quelle que soit la résistance qu’on lui  oppose, le destin de l’art est de se transformer en métier ». C’est dire que le questionnement propre à toute démarche créatrice est remplacée par un chemin critique établit par des professionnels du métier. Mais la profession n’existe-t-elle pas que dans le cadre d’obligations indispensables d’un marché ?

 

[viii] Dans le phasage des études des projets c’est la partie initiale qui est la moins bien rémunérée et la plus courte. Ces deux éléments contribuant à un investissement relatif en réelles connaissances et donc à sa substitution par des trucs à concours, des images, souvent des images de marque. Dans le Harvard Design, Magasine ( fall  2003) Eric Lum professeur à l’Illinois Institute of Technology déclare : « on peut toujours arguer que la recherche formelle en architecture est un exercice valide pendant les académies. Le problème vient quand il faut assumer la réalisation des images, qui sont ce que font les architectes pour l’essentiel ».

 

[ix] Lors d’un récent colloque sur la presse et la critique architecturale est apparue la difficulté à poser la bonne question. Un tenant de la certification par le diplôme se plaint que 60% des constructions ne sont pas « signées » par des architectes. Pourtant dans les 40% restant qui le sont on trouve de grands ensembles, une multitude de zones sinistrement aménagées et des grands projets dont la réussite est contestable. L’argument du diplôme garantissant la qualité ne tiens pas, d’autant que notre passé c’est  99% de constructions qui se passaient d’architectes. Sans nostalgie, on peut souvent s’en réjouir.

 

[x] Il y a en tête de chaîne le commanditaire et puisqu’il s’agit de constructions de prestige, c’est dans 90% des cas des élus. Et comme on le sait la publicité est bien adaptée au rythme soutenu des échéances électorales.

Il y a les maîtres d’œuvre, principalement les architectes.

A l’autre bout de cette chaîne c’est nous, les citoyens, usagers potentiels, et ce n’est pas une extravagance d’avoir à partager les responsabilités de cette situation.

 

 

[xi] Les grands projets ne représentent qu’une très petite part du domaine bâti. Mais elles véhiculent les valeurs de symbole et participent à fixer le cap de marche de la société. Dans l’imaginaire collectif persistent néanmoins des modèles usés à la corde comme par exemple la petite maison avec le toit pointu et la cheminée qui fume. Un must du marché des illusions et qui fait des dégâts considérables sur l’environnement.

 

[xii] «  L’effet Beaubourg » Jean Baudrillard, Galilée Ed.

 

[xiii] L’étude appelée « Le Volume bleu et jaune ».

 

[xiv] Escuela de Valparaiso/grupo ciudad abierta .Ediciones Tanaïs s.a, Sévilla.

 

[xv] « Godo » c’est à dire le poète Godofredo Iommi fut l’instigateur du cérémonial de prise en compte des sites par une démarche poétique. Les « Phalènes ». Citons aussi Juan Borchers, le philosophe François Fedier, le sculpteur Claudio Girola et la présence ponctuelle de Max Bill.

 

[xvi] Ces deux architectes n’en sont pas moins de très grandes figures de la création architecturale.

 

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Jojo Pous est parti https://germinal.rebull.fr/jojo-pous-est-parti/ https://germinal.rebull.fr/jojo-pous-est-parti/#comments Sat, 18 May 2013 09:43:10 +0000 http://germinal.rebull.fr/?p=254 En faisant bien le compte, je ne l’ai rencontré qu’une vingtaine de fois en 40 ans. La plupart du temps c’était toujours au travers de quelqu’un qui me le présentait «Bonjour, tiens voici  GR… il est avec moi ». Ce qui fait que j’ai été présenté à Jojo vingt fois, et j’écoutais les échanges du quelqu’un […]

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En faisant bien le compte, je ne l’ai rencontré qu’une vingtaine de fois en 40 ans. La plupart du temps c’était toujours au travers de quelqu’un qui me le présentait «Bonjour, tiens voici  GR… il est avec moi ». Ce qui fait que j’ai été présenté à Jojo vingt fois, et j’écoutais les échanges du quelqu’un avec Jojo. Je n’avais pas trop à dire finalement.

La première fois que je l’ai vu j’avais été embarqué par une troupe en goguette pour aller déjeuner « als Templers », son restaurant. Il y avait dans cette compagnie Francis Coste et Claude Vedel, artistes peintres de leur état. C’était à l’initiative de Vedel que cette équipe se dirigeait vers Collioure. Et on allait se régaler du meilleur de la carte nous avait promis Vedel. Je me tenais tranquille peu enclin par nature à l’enthousiasme gastronomique lequel m’échappe hélas. Cependant à Collioure, festoyer c’est ce que nous fîmes et fort agréablement jusqu’à l’arrivée de l’addition. Là, royal et sûr de son art, Vedel ouvre un carton à dessins, le parcourt et rieur annonce l’impensable troc entre une généreuse gamelle et un dessin, mais colorié quand même, cela fera bien le billet!

Jojo connaissait manifestement la procédure car il accepta lui aussi en souriant à ce  panel d’artistes à la peine et choisit un format sous dimensionné au regard des estomacs remplis. Il a du en connaître de ces artistes pour avoir compris  que la seule issue c’était la porte de la bienveillance. Son sourire à lui rajoutant discrètement « ne  me  fait pas le coup trop souvent quand même. »

Au fil des ans je l’ai revu, toujours comme le fils de…  l’ami de … le compagnon de …et je ne lui ai jamais  parlé directement. Pourtant j’ai construis autour  de sa personne un halo d’admiration respectueuse. C’est qu’il l’inspirait.  Ami de son fils  j’étais  tenu au courant de la fin de sa trajectoire au jour le jour. Jojo était bien entouré.

A  son enterrement j’y étais. Il me fallait vérifier si l’auréole de respect que j’avais mis sur sa tête se présenterait à l’église de Collioure. Elle s’y présenta.

Ce jour là j’ai beaucoup aimé la pluie en attendant l’arrivée de sa dernière automobile, laquelle fut très bien conduite d’ailleurs et à vitesse solennelle et réglementaire.

Qu’aurait –t-il dit Jojo s’il avait pu voir tout ces parapluies dans son sillage, à sa poursuite vraiment, comme la trace d’un pinceau d’un maître pointilliste, répartissant là et là toutes ces sombres ombrelles s’agitant derrière son ultime carriole.

Je ne sais pas s’il peignait mais il s’y connaissait sûrement. Car comment expliquer cette jolie peinture pour ses ultimes et amicales salutations composée selon des directives qu’il aurait emprunté carrément de Georges Seurat.

Le cortège, comme une vague de cette mer calme bien parallèle à la rive de la rade de Collioure, tous ces pépins brillants, vernis par la pluie d’où pendaient souliers et jambes dansants le long de la grève dans une chorégraphie dont les tracés étaient conformes aux lois des courants et forces marines de la Méditerranée.

C’est une horde de parapluies qui suivait Jojo, famille et amis dans le rythme de la journée grise. C’est qu’il en avait distribué des amitiés. Belle cérémonie.

Reste alors la question de savoir comment Jojo s’y prenait pour offrir à des quidams qui l’ont à peine côtoyé autant d’occasions de manifester un silencieux respect. Je suis de ceux là.

Jojo était d’une espèce rare, toujours dans l’espace de ce pays, un rocher, ou la mer, un pied de vigne peut être, un mètre de murette, un morceau de notre paysage finalement. Oui de notre paysage.

Jojo Pous est dans le paysage désormais, le notre. C’est un début de réponse.

Banyuls sur mer, avril 2013

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Un précurseur de l’homme au bidon https://germinal.rebull.fr/un-precurseur-de-lhomme-au-bidon/ https://germinal.rebull.fr/un-precurseur-de-lhomme-au-bidon/#comments Sat, 18 May 2013 09:15:59 +0000 http://germinal.rebull.fr/?p=232  Une saga amicale sur des voyages de jeunesse. Pour célébrer l’ami de route une sorte de texte illustré mélange les préoccupations des protagonistes à des éléments autobiographiques. Portés à la dérision il n’en reste pas moins qu’émergent déjà les préoccupations de chacun d’eux. Comprendre le sens des trajectoires des uns et des autres au travers […]

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 Une saga amicale sur des voyages de jeunesse. Pour célébrer l’ami de route une sorte de texte illustré mélange les préoccupations des protagonistes à des éléments autobiographiques. Portés à la dérision il n’en reste pas moins qu’émergent déjà les préoccupations de chacun d’eux.

Comprendre le sens des trajectoires des uns et des autres au travers de rencontres inattendues et surprenantes. Comme dans l’Homme au bidon.

Le texte est cependant complété par de belles fautes d’orthographe…Ainsi était la vie

4 extraits

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1993 Germinal Rebull

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